En cette saison où, dans les champs,
dominent la couleur de la terre, le vert de l'herbe ou les tons
gris-brunâtres des plantes herbacées qui sont mortes,
de belles touffes attirent l'attention. Elles sont de dimension
assez importante et couvertes de belles fleurs jaunes très
lumineuses, apparemment insensibles aux intempéries. On se
rappelle alors en avoir vu en fleur pendant l'été
ou même le printemps. L'idée d'en récupérer
un pied pour l'installer chez soi devient alors tentante car l'effet
décoratif de cette plante est évident.
Ne cédez surtout pas à la tentation! C'est une belle
envahisseuse très agressive.
Il s'agit du séneçon du Cap, senecio
inaequidens ou senecio harveianus,
dont les graines ont voyagé dans la laine des moutons importés
d'Afrique du Sud. Elle appartient à la famille des composées
ou astéracées.
La plante forme une touffe arrondie et dense de tiges
ligneuses, d'abord couchées puis redressées et
ramifiées ; elle peut atteindre 40 à 110 cm de haut.
Les nombreuses feuilles
persistantes, de 4 à
10 cm de long, sont très étroites (linéaires)
et assez épaisses, leur bordure est finement dentée
et la nervure principale est bien en évidence.
La
floraison est quasiment ininterrompue toute l'année ;
les fleurs sont des capitules de
20 à 25 cm de diamètre avec 10 à 15 ligules
périphériques.
Ces fleurs sont réunies en inflorescence du type corymbe.
Les
fruits sont des akènes
munis de soies plumeuses qui facilitent leur dispersion ; chaque
pied peut en produire de 10 000 à 30 000 par an!
L'invasion
par ce séneçon a débuté en France
aux alentours des années 1934-1936, à partir de centres
de traitement de la laine, dans la région de Calais mais
surtout à Mazamet. La progression de cette invasion a été
fulgurante car la plante est bien organisée pour cela
:
- sa production de graines est très importante et dure toute
l'année
- celles-ci, sont facilement disséminées par le vent,
les animaux ou les activités humaines
- elles germent facilement ou restent en vie plusieurs années
( peut être plusieurs dizaines d'années)
- la plante pousse sur tout type de sol
- elle prospère en climat méditerranéen mais
ne craint pas le froid et supporte même les hivers de montagne
- elle résiste bien aux incendies et repousse facilement
de la base ( à moins d'avoir été calcinée)
- la plante diffuse dans le sol des substances toxiques pour ses
voisines
- la présence d'alcaloïdes toxiques rend ce séneçon
immangeable par les animaux , la plupart des insectes y compris.
On comprend maintenant pourquoi la conquête de nouveaux
territoires soit si rapide. Le séneçon du Cap
s'est d'abord répandu le long des voies de communication
: autoroutes, voies ferrées , voies navigables, il a envahi
ensuite les espaces cultivés ou non : friches, prés,
vignes, etc ; seuls les bois et les garrigues sont épargnés.
Il suffit également qu'un espace soit dégagé
par des travaux ou un incendie pour que ce séneçon
s'y installe aussitôt.
Le danger est donc bien réel car la prolifération
de cette plante risque d'appauvrir et d'uniformiser la flore de
nos campagnes et de dégrader de plus en plus les pâturages.
Que faire alors pour combattre cet intrus? Plusieurs solutions
sont envisageables :
- arracher et détruire par le feu les pieds isolés
- labourer et desherber régulièrement les surfaces
cultivables
- éviter le pâturage intensif aux alentours des zones
infestées
- éviter les incendies
- pratiquer le sur-semis d'espèces qui couvrent le sol très
facilement : trèfle, luzerne
- mettre au point la lutte par un insecte qui s'attaquerait à
cette plante en priorité.
Étant donné l'importance de la menace, la conjugaison
de tous ces moyens sera indispensable et permettra de limiter
l'expansion de cet envahisseur.
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